Le Comité Afrique de l'Internationale Socialiste, lors de sa première réunion du millénaire à Yaoundé, Cameroun, les 30 juin et 1 juillet 2000, a examiné l'évolution du processus de démocratisation dans toute l'Afrique, les conflits existants et les menaces à la paix et à la stabilité sur le continent et les voies et moyens pour lutter contre la pauvreté, et déclare:
1. Sur le processus de démocratisation
Considérant que même si les circonstances dans lesquelles les principes de la démocratie sont appliqués peuvent varier en raison des spécificités locales, ces principes demeurent dans tous les cas universels;
Considérant que le vent de changement démocratique qui a commencé à souffler au début de la décennie 90 a produit des résultats mitigés en Afrique comme la louable alternance démocratique du pouvoir au Sénégal d'un côté, et d'un autre côté le blocage total du processus électoral démocratique dans des pays comme le Cameroun, le Togo, la Guinée et la Guinée Equatoriale, par exemple;
Le Comité
• félicite le peuple du Sénégal pour sa maturité politique et plus particulièrement le Parti Socialiste du Sénégal pour avoir reconnu et accepté de bonne grâce l'alternance démocratique;
• condamne fermement les régimes qui ont fait tout leur possible pour paralyser le processus démocratique dans leurs pays respectifs;
• leur demande de mettre en place immédiatement les institutions et les mécanismes qui assureront et garantiront l’organisation d’élections libres et équitables, à savoir:
- un organisme neutre avec une autonomie financière et légale, chargé d'assurer la transparence et la crédibilité du processus électoral;
- la participation entière et égale de tous les citoyens à tous les secteurs de la société, y compris les femmes et la jeunesse;
- l’égal accès aux medias publics;
• demande l'établissement d'une législation spéciale énonçant la mise en place des statuts de l'opposition, reconnaissant les droits et devoirs de celle-ci;
• lance un appel à la famille socialiste, plus particulièrement ceux qui sont aux affaires pour exercer de fortes pressions sur les gouvernements africains qui sont toujours insensibles aux valeurs et principes démocratiques;
• rejette de façon catégorique l'idée d'une version africaine, asiatique ou européenne de la démocratie si elle n’est pas conforme aux principes démocratiques universels.
2. Sur les conflits et les menaces à la paix et à la stabilité en Afrique
Prenant en compte les décisions du XXIème Congrès de l'Internationale Socialiste à Paris en novembre dernier;
Rappelant le rapport de Dakar sur la typologie et la résolution des conflits en Afrique;
Considérant le blocage dans certains pays africains du processus démocratique électoral, l'effrondrement de l'ordre politique et social dans d’autres et l'extrême pauvreté en Afrique;
Le Comité
• réaffirme les recommandations concernant la paix et la résolution des conflits du XXIème Congrès de l’Internationale Socialiste;
• recommande la création et la mise en œuvre de mécanismes de prévention et de gestion des conflits;
• déclare que la paix ne signifie pas nécessairement l'absence de conflits;
• réaffirme que la démocratie, la bonne gouvernance et la justice sociale sont des conditions nécessaires à la paix;
• lance un appel à la grande famille de l'Internationale Socialiste pour mobiliser des ressources à travers le monde pour aider à la promotion de la paix et au soulagement de la souffrance en Afrique.
3. Les voies et moyens pour lutter contre la pauvreté
Considérant que les causes de la pauvreté peuvent varier d’un pays à un autre;
que le poids du fardeau de la dette paralyse pratiquement toutes formes de développement;
la nécessité d’éliminer toutes formes de corruption;
que les liens économiques de la plupart des pays africains avec le monde développé ne doivent pas être des relations de dépendance;
que les plans d’ajustements structurels ont exacerbé la pauvreté;
Le Comité
• préconise avec force la mise en place d’une stratégie globale de développement basée sur la démocratie, la bonne gouvernance, la décentralisation et la participation effective de la population à tous les niveaux;
• recommande avec force que chaque pays concerné devrait élaborer un programme spécifique de développement et de lutte contre la pauvreté;
• considère que la politique actuelle d’allègement de la dette proposée par les institutions financières internationales n’a pas répondu aux attentes des populations;
• s’étonne de la base sur laquelle certains pays ont été déclarés éligibles pour le programme d’allègement de la dette;
• réaffirme qu’un des critères principaux d’éligibilité devrait être la bonne gouvernance et la démocratie;
• recommande que l’aide au développement soit essentiellement utilisée au profit des populations exclusivement;
• recommande la création d’un Fonds international de lutte contre la pauvreté;
• recommande que les liens économiques soient basés sur un partenariat équitable. A ce sujet, le sommet du Caire constitue un bon début.