LES AUTORITÉS LOCALES ET LE MARCHÉ DU TRAVAIL: LES POLITIQUES SOCIALES-DÉMOCRATES POUR ASSURER LE TRAVAIL ET FAIRE FACE AU CHÔMAGE
Le travail a toujours été la condition, par excellence, de l'espèce humaine. Le caractère du travail a changé selon l'évolution de la vie sociale. Par conséquent, depuis les sociétés primitives jusqu'à nos jours, l’exercice du travail s’est transformé. De nos jours, du fait des formes dominantes de l'organisation de la production et de la concentration spatiale de la production dans les sociétés capitalistes urbaines, le travail s’exerce principalement en tant qu’emploi salarié urbain.
- Les dernières modalités d'intégration de nos pays à l'économie globale (sous l'euphémisme de ´village globalª) ont fait du chômage urbain le défi principal. Il est évident que les politiques macroéconomiques ou sectorielles, lorsqu’elles ont lieu, n'ont pas suffi à contrecarrer les effets de la mondialisation économique, en particulier dans les pays en voie de développement. La privatisation des entreprises publiques, le réajustement de la formation du personnel aux nouvelles formes d'organisation du travail et de la production au sein des entreprises, la fermeture des établissements ou des chaînes de production du fait des ouvertures économiques discriminées et soudaines, ont eu comme effet caractéristique une augmentation du chômage urbain bien que certains pays, très peu nombreux d’ailleurs, vont connaître des taux acceptables de croissance économique.. La description ci-dessus mentionnée s’accentue lorsque l’on enregistre l'impact des migrations postérieures aux crises des économies régionales et qui, du fait des opportunités de survie, recherchent dans les villes leur lieu d’enracinement
- L'autre face du chômage urbain a été la désintégration sociale. Une fois la condition d'ouvrier perdue, la qualité de consommateur et de citoyen, qui le complète dans de grands segments de la population, s’affaiblit jusqu'à l’épuisement total.. La liberté et l’égalité se vident de leur contenu. La responsabilité de contrecarrer cet état de choses semble se déplacer vers les gouvernements municipaux, sans que ceux-ci n’aient pourtant pas les ressources et les attributions suffisantes pour mettre en oeuvre des solutions afin de résoudre les problèmes du chômage.
- On assiste, chaque jour davantage, à une disposition des citoyens, de façon individuelle ou organisée, à présenter leurs demandes devant les instances municipales. Cette tendance est renforcée lorsque l’on observe le processus de repositionnement des organisations citadines des patrons et des syndicats du fait de la difficulté qu’ont les organisations patronales nationales et les organisations syndicales nationales à répondre à la diversité des impacts de la mondialisation dans les villes et dans les régions.
- Le défi est si grand et urgent pour nos villes que la récurrence au slogan de ´l'égalité des chancesª et une réduction régressive des idéaux de la Révolution Française - Liberté, Égalité, Fraternité — qui furent incorporés et développés au sein des mouvements socialistes du siècle dernier, ne semblent pas suffisants. Ceci concorde avec la réflexion énoncée il y a peu de temps par J.Delors au sein de la Communauté Européenne: " La compétition stimule, la collaboration fortifie, la solidarité unit ".
- L'égalité des chances, condition nécessaire pour atteindre l’équité, sera difficilement une réponse effective si ses limites consistent à placer les personnes dans les mêmes conditions pour être en concurrence dans un capitalisme sauvage qui n'a pas encore démontré, et le démontrera difficilement, sa capacité de résoudre, de façon structurelle, le problème du chômage. L’égalité d’accès aux services de santé, d’éducation, de formation professionnelle, de justice et de sécurité est insuffisant sans les opportunités de travail. À titre d’exemple, inter alia: sans travail rémunéré, il n'y a pas de santé ni d’éducation continue et universelle.
- Par conséquent, il faut exiger l’égalité des chances dans le travail; et le défi qui en découle pour les villes est de compléter le développement des forces productives avec les formes civilisées et civilisatrices de l’exercice des politiques publiques, efficaces de par leur impact immédiat et de par leur promotion médiate des nouvelles pratiques sociales. Il existe d’anciennes propositions appartenant au domaine de la science économique: sans une augmentation de la productivité, il n'est pas possible d’atteindre une augmentation des revenus individuels; sans une augmentation du progrès technique et des compétences professionnelles, on ne peut pas augmenter la productivité; sans une augmentation durable de l’épargne et sans investissement, l'augmentation de l'emploi est une chimère. Afin que ces propositions acquièrent le statut de faits accomplis, une école de l'économie politique propose l’exercice de politiques actives menées à bien dans des espaces institutionnels de collaboration entre les agents publics et privés où se trouveraient les étapes d’élaboration, de mise en oeuvre et d’évaluation des politiques. En d'autres termes, aussi important que la formulation de politiques donnant une réponse aux différents problèmes posés à nos sociétés urbaines (parmi lesquels se trouve la contradiction, statistiquement, vérifiable, entre opportunités moindres de travail et le plus grand nombre d’heures effectives de travail) l'est le travail «d’ingénierie sociale» exigé pour construire les espaces institutionnels appropriés.
- Il n'y a pas de formules magiques pour augmenter l'emploi et la magnitude du problème du chômage ne se fonde pas non plus sur une formule unique. C'est typique de la droite de déclarer que la croissance économique résoudra le chômage urbain, et qu'une baisse des impôts favoriserait la croissance économique. Cette proposition est du paganisme pur. Car, à propos, la croissance économique est une condition nécessaire qui nous rendrait moins difficile le fait d’assumer les problèmes moraux dans notre cohabitation urbaine, qui peut se résumer dans la question suivante: combien de nos revenus personnels et de notre temps de travail sommes nous disposés à accorder aux programmes en faveur des chômeurs afin que ceux-ci puissent jouir des fruits de la culture, de la connaissance scientifique et du progrès technique? Plutôt, la persistance de ces problèmes jusqu'à atteindre une société plus humaine et plus juste exigera que l’on trouve des réponses en ayant recours aux valeurs religieuses et socialistes qui sont, à des degrés différents, incorporées dans notre culture contemporaine, mais non pas appliquées suffisamment.
- D’autre part, si une seule formule n'est pas suffisante (surtout si elle est magique parce qu'elle correspond au monde des désirs éloignés de la réalité), la solution repose sur des politiques actives menées à bien à partir de différents niveaux institutionnels que les gouvernements municipaux stimulent fortement et où on trouverait un degré élevé d'engagement.
- Parmi les autres composants de ces politiques actives, nous pouvons mentionner les suivants: l'exercice des autonomies des gouvernements locaux; les politiques de recettes et de dépenses de la municipalité; la focalisation des programmes spéciaux pour l’emploi, la création de nouvelles professions urbaines; l’assistance technique fournie par les universités aux nouveaux entrepreneurs et aux petites et moyennes entreprises; l'engagement de tout le système éducatif formel pour former les personnes; la création de conditions locales en vue d’augmenter l'investissement et l’application des innovations technologiques; le renforcement de l’emploi admettant le travail à temps partiel et le temps partagé de travail en vue de favoriser les opportunités de travail des femmes, des jeunes, des handicapés et des travailleurs qui devront prendre sous peu leur retraite.
- Parmi les politiques actives et en conformité avec la plate-forme de Beijing, nous affirmons la promotion nécessaire de l'emploi pour les maîtresses de maison et l’obtention de rémunération égale pour un travail de même valeur pour les femmes et les hommes.
- Certes, deux considérations accompagnent nécessairement cet énoncé des politiques actives. La première est que l'exercice des politiques actives a des coûts explicites dont le financement n'est pas recouvert exclusivement par l'efficacité dans les dépenses, y compris la réaffectation des composants de la dépense. Il faut donc accepter peu à peu l’idée selon laquelle la dépense solidaire, pour pouvoir cohabiter en sécurité et de façon fraternelle dans les villes, exigera une augmentation des revenus municipaux: d’où l'importance de l'autonomie municipale et de la politique budgétaire. Il est évident que la redistribution des revenus qui accompagnerait l’application de ces politiques actives est également une façon de contrecarrer la tendance à la concentration des revenus par la dynamique des marchés capitalistes.
- Aussi important que ce qui est mentionné ci-dessus, et lié à la focalisation de la dépense, c'est la dépolitisation des ressources des gouvernements nationaux et, dans leur cas, des gouvernements provinciaux. C'est-à-dire que la décentralisation vers les villes des programmes d'infrastructure et des programmes sociaux est une façon plus efficace d'assurer le fait que les opportunités de l'emploi sont vraiment dirigées vers ceux qui en ont le plus besoin. Contrairement aux affirmations néolibérales qui minimisent le rôle des villes et afin que les municipalités puissent intervenir de façon efficace dans la création d’emplois dignes, on accorde une attention toute particulière au cadre juridique pour la coordination entre les pouvoirs nationaux, provinciaux et locaux.
- La deuxième considération, liée à l'antérieure, est que l'exercice des politiques actives va dépendre de l’élaboration et de l’application d’espaces institutionnels appropriés, dans lesquels, comme on l’a déjà dit, la collaboration des agents privés et publics s’exerce en tant que façon d’exercer la participation citoyenne et la décentralisation des décisions. Par conséquent, une politique active dans la ville n'est pas de la responsabilité exclusive du gouvernement municipal, mais est une tâche partagée par les citoyens qui décident de s’impliquer en vue de construire une ville humaine et juste fondée sur le travail.
- Énoncées différemment, les considérations antérieures figurent dans la Déclaration de Bologne (janvier 1995) et dans la Déclaration de Fez (Octobre 1998) que les Maires de l'Internationale Socialiste ont approuvées. Au cours de ces deux réunions, les maires socialistes ont reconnu en tant ´qu’objectif international des socialistes le fait de promouvoir le corporatisme localª (Bologne), et ´qu’il fallait améliorer les aides au développement au moyen de la coopération décentralisée et de la solidarité internationaleª (Fès).
- Parallèlement à ces Déclarations, la Déclaration de Rosario signale la nécessité de mettre en oeuvre le corporatisme, la coopération décentralisée et la solidarité internationale afin de créer des espaces institutionnels dans les villes, à partir desquels on pourrait promouvoir les politiques de
- génération de l'emploi et du travail rémunérés. Depuis la première Conférence célébrée en 1995, les gouvernements socialistes des villes des hémisphères Nord et Sud ont incorporé peu à peu un apprentissage institutionnel, peut-être insuffisant, mais représentant une expérience vaste dans cette accumulation d'expériences. Évidemment, on ne devrait pas passer outre les bons résultats des politiques d'administration des villes sous les gouvernements d'autres signes.
- Certes, la dissémination des expériences qui appliquent les technologies de l'information est une voie, comme nous l’avions signalé à Fez en 1998. Cependant, on ne devrait pas passer outres les solutions alternatives qui mettent en contact les agents publics et privés des villes socialistes afin d’encourager la célébration de réunions de travail, les échanges et la discussion sur les espaces institutionnels et les politiques plus efficaces.
- À cet effet, la Déclaration de Rosario insiste sur la nécessité de créer immédiatement un Réseau de Solidarité Intervilles Socialistes (RSIS) pour mettre en oeuvre des initiatives répondant à l’urgences de créer, à court terme, des opportunités de travail rémunéré. La création de cette Solidarité entre les villes socialistes serait un exemple excellent pour stimuler l'initiative plus large qu’eurent autrefois Habitat-Un et un groupe de villes, qui voulaient atteindre le même objectif, à savoir créer des solidarités.
- La création de ce RSIS pourrait être financée par les fonds de coopération internationale figurant dans les budgets de quelques villes ou les régions ayant une administration socialiste. En fait, la Région d'Extrémadure a accordé une contribution importante à la Municipalité de Rosario pour pouvoir mettre en oeuvre le Programme d’Opportunité d’Éducation et de Formation professionnelle des Jeunes se trouvant dans des situations de risque social. Les exemples comme ce dernier pourraient se multiplier pour exercer les principes de coopération décentralisée et de solidarité internationale entre les villes.
- Ces fonds de coopération internationale auraient d'autres applications possibles, à savoir l'échange d'expériences avec un impact sur l’emploi comme par exemple:
1. Les programmes sur l'emploi et la politique fiscale locale (y compris les nouvelles professions, les services pour l'emploi et d’autres espaces institutionnels).
2. Les agences de développement pour la croissance du secteur privé et la politique fiscale.
3. L'harmonisation des ressources nationales, provinciales et municipales, pour la centralisation des dépenses de l'emploi.
4. Les politiques urbaines d'éducation et de formation professionnelle.