Une réunion extraordinaire du Comité de l’IS pour les Migrations a eu lieu le lundi 1 juin 2015, à Rabat, focalisée sur une réponse sociale-démocrate à la crise des migrations qui se déroule dans différents pays. La réunion était organisée au Parlement marocain par l’Union Socialiste des Forces Populaires (USFP).
Le comité, présidé par Habib el Malki (USFP), a concentré ses discussions sur trois thèmes: a) Les demandeurs d’asile et les migrants qui fuient les conflits civils et les violences: l’obligation de la communauté internationale de les sauvegarder et de les protéger; b) La responsabilité morale et humanitaire qui nous incombe de réagir face au sort des migrants qui fuient la pauvreté et la famine; et c) L’élaboration d’une réponse à la crise actuelle basée sur nos valeurs et nos principes.
Driss Lachguar, premier secrétaire de l’USFP, a prononcé une allocution dans la séance d’ouverture. Il a souligné la nécessité de pouvoir s’appuyer sur une feuille de route pour mettre au point une nouvelle approche exhaustive face au phénomène actuel des migrations, qui, loin d’être uniquement dû à des facteurs économiques, est également une conséquence de l’idéologie de la guerre froide dont nous avons hérité, alimentant le sentiment d’instabilité et d’insécurité; il existe d’autre part une corrélation avec les marchands d’armes et ceux qui financent le terrorisme. Il a souligné la diversité propre au Maroc, avec son héritage maure et juif qui résulte de l’immigration au 16e siècle, et regretté le manque de stratégie à moyen ou à long terme du gouvernement actuel du Maroc en vue de traiter de manière efficace ce problème.
Le comité a ensuite écouté la contribution de Driss El Yazami, président du Conseil national pour les droits de l’homme au Maroc, qui a exposé les mutations intervenues ces dernières décennies en matière de migrations. Soulignant la nature diversifiée des migrants actuels, au nombre desquels figurent des diplômés universitaires, et le nombre élevé de femmes et d’enfants qu’on y dénombre aujourd’hui, il a indiqué que tous les pays du monde sont maintenant touchés et tous sont des pays de départ. Il a par ailleurs souligné la nécessité de débattre le fait que la question des migrations est utilisée comme instrument de campagnes politiques, ainsi que des sujets clés de gouvernance internationale et de montée de la xénophobie.
Pour conclure la séance d’ouverture, le Secrétaire général de l’IS a rappelé que l’histoire avait montré que les migrations sont une source de richesse, à la fois économique et culturelle, et que, dans la crise actuelle, les droits fondamentaux de nombreuses personnes sont bafoués et beaucoup trop d’États ne les respectent pas. Le niveau actuel d’injustice est immense si l’on considère les millions de personnes déplacées par les guerres, les conflits civils, la famine et les difficultés économiques. Il a souligné en particulier la nécessité, face à cette crise, d’agir en phase avec les valeurs qui unissent notre mouvement et incarnent notre identité, et d’œuvrer pour parvenir à des solutions politiques et humaines au lieu de recourir à l’usage de la force.
En décrivant les tâches qui nous attendent, le président du comité a insisté sur la nécessité urgente de concevoir un plan d’action; de parvenir ensemble à un diagnostic de la situation dans différentes parties du monde afin d’identifier les causes réelles des circonstances présentes et de remonter à la source plutôt que de s’attaquer aux conséquences; de traiter le phénomène des migrations comme symptomatique du chaos et de la destruction des institutions auxquels on assiste dans de nombreux pays; de chercher des solutions autres que des solutions militaires répressives; et de porter un regard neuf sur le concept de sécurité, en plaçant l’être humain au centre des préoccupations.
Comme invité spécial, Tun Khin, un activiste rohingya de renommée internationale, a fait une présentation sur l’histoire et le sort de ce groupe ethnique de Birmanie, les Rohingyas, qui ont été dépossédés de leur nationalité. Sur une population de 3,5 millions, plus de 1,5 million ont été forcés de fuir leur patrie en Birmanie en raison des persécutions et des violences qu’ils subissent. À l’heure actuelle, 8 000 Rohingyas sont amassés sur des bateaux qui dérivent en mer, les pays voisins refusant de les accueillir. Il a souligné à qu’il était important de s’attaquer aux causes profondes du déplacement de son peuple.
Lors des discussions, il a été rappelé que, même si l’accent est mis actuellement sur le sort des migrants en mer, les migrations se font aussi en traversant le désert et que de nombreuses personnes meurent ainsi en Afrique. En insistant sur les bénéfices de la migration, on a souligné que ce n’était pas la migration en soi qui était problématique, ce sont les migrations illégales auxquelles il faut s’attaquer. On a également jugé qu’il était nécessaire de forger un lien entre migration et développement et d’adopter des programmes de transfert de technologies afin de stimuler le développement, quand il le faut. Alors qu’on s’attendait à ce que la globalisation et la révolution informatique apportent le progrès, elles ont dans certains cas apporté la terreur, la guerre, l’arrivée des tanks et fait encore plus de victimes. La communauté internationale doit renouveler ses efforts politiques en vue de la libération des peuples opprimés. En ce qui concerne l’Europe, la nécessité de partager le fardeau ainsi que le besoin d’action urgente pour sauver des vies ont été soulignés.
Il importe de formuler une approche qui soit basée sur le genre, vu le nombre élevé de femmes qu’on dénombre parmi les migrants et leur vulnérabilité spécifique face aux abus.
Pour conclure ses discussions, le comité a adopté une Déclaration et convenu de poursuivre le travail engagé lors de réunions précédentes, à savoir la rédaction d’une Charte des droits des migrants, dans l’objectif de la présenter pour qu’elle soit adoptée lors du prochain Conseil de l’Internationale socialiste qui doit avoir lieu au siège des nations unies à New York, les 6 et 7 juillet. La Charte vise à fournir aux partis membres de l’IS un code de conduite pour l’action politique.